25/02/2010
De quelle réforme territoriale avons-nous besoin ?
La question de la réforme territoriale est dans les esprits des décideurs publics et des élus depuis de nombreux mois… Pas sûr pourtant que tous aient une vision partagée des objectifs à atteindre par une telle réforme.
Pour mettre les choses au clair et essayer de dégager des orientations autant que possible consensuelles, le Sénat avait mis sur pied courant 2009 un groupe de travail pluraliste conduit par le Sénateur BELOT (UMP). Débattu et approuvé par la haute assemblée le 30 juin 2009, le Rapport Belot fixait quelques lignes d'actions prioritaires pour conduire la réforme : Renforcement de la coordination des exécutifs locaux au niveau régional et départemental (« Non » au conseiller territorial) ; renforcement du « chef de filat » (« Non » à la remise en cause de la clause générale de compétence) ; renforcement de l’autonomie fiscale, maintien d’un impôt économique local et amélioration de la péréquation tant verticale qu’horizontale (au total, 90 propositions).
Le gouvernement aurait pu faire le choix de caler son projet de réforme sur les conclusions consensuelles de ce rapport Belot du Sénat. Mais il a décidé de procéder différemment tant en ce qui concerne la méthode utilisée que la philosophie politique mise en œuvre pour bâtir le projet de loi.
- Une méthode peu orthodoxe
- Il n’a échappé à personne que le calendrier était inapproprié. Il paraît en effet étrange d’avoir procédé à une réforme des finances locales (suppression de la taxe professionnelle et mise en place de la CET, votée en loi de finances 2010…) avant d’avoir clarifié les compétences, réforme elle-même renvoyée à mi-2011 ! La clause de rendez-vous de la réforme de la taxe professionnelle est théoriquement un ajustement. Mais si la clarification des compétences aboutit à des transferts de compétence, il faudra inévitablement reprendre à zéro la réforme des finances locales !
- S’agissant de la réforme « à l’aveugle » des finances locales, on notera que la suppression de la TP a été votée dans un manque déplorable de transparence (absence de simulations fiables)
- Cette méthode peu orthodoxe génère une insécurité générale pour les décideurs locaux qui ne savent plus très bien de quoi demain sera fait…
- Une philosophie politique contestable
- Le discours culpabilisateur envers les élus locaux accusés d’être « gaspilleurs » est en profond décalage avec le rôle irremplaçable joué par les collectivités territoriales sur le terrain, qui, en 2008, ont assuré 73 % de l’investissement public, et dont la dette représente moins de 10 % de l’endettement national.
- Sans explications convaincantes, les départements sont placés dans le viseur de la réforme… sans qu’on sache d’ailleurs comment seraient à l’avenir organisées les compétences sociales dans le pays.
- On ne peut approuver non plus la remise en cause de l’autonomie acquise lors des différentes étapes de la décentralisation pas plus que l’absence dans le texte de la péréquation et de la solidarité des territoires. D’inspiration recentralisatrice, cette réforme vise à une profonde réhabilitation du pouvoir étatique. Il en va par exemple des nouvelles modalités de fixation des taux (définis nationalement pour l’essentiel) comme du rôle accru dévolu aux préfets et préfets de région.
Le sujet des territoires est à mes yeux fondamental et mérite une démarche pragmatique et si possible consensuelle. Au lieu de cela, la méthode à la hussarde qu’on nous impose s’appuie sur une approche « libérale » de la gestion locale et repose –beaucoup le craignent et le regrettent (élus de toutes sensibilités d’ailleurs) - sur un souci de reconquête politique de territoire à l’aide des fameux conseillers territoriaux qui seront élus à partir de 2014 sur des circonscriptions redécoupées et selon un mode de scrutin à un tour qui s’annonce très « alambiqué »…
A mon sens, ce sujet extrêmement important aurait mérité un traitement moins partial. Car si les élus ne sont pas vite rassurés et ne savent pas clairement de quoi demain sera fait, ils risquent de geler bien des projets, restreignant de ce fait la qualité du service public de proximité…
Vraiment regrettable.
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