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03/01/2013

Une grande redistribution fiscale est en marche

François MARC,valeurs locativesLa censure par le Conseil Constitutionnel de l'article 8 du PLF (1) portant sur la Contribution Exceptionnelle de Solidarité (taxation à 75%) a suscité nombre de commentaires, pour la plupart critiques sur l'action du gouvernement et pour certains très revendicatifs quant à la nécessité de réformes fiscales de grande ampleur.

Certains se demandent par exemple quand la gauche va-t-elle enfin « mettre en œuvre une grande réforme redistributive » ? (Libération du 30/12/12)

Mais se contenter d'une analyse selon laquelle le gouvernement de gauche ne s'est depuis juillet 2012 contenté que de « rustines fiscales symboliques (2) », c'est oublier qu'un dispositif redistributif de très grande envergure a été lancé par le gouvernement à la demande et avec le soutien unanime du Sénat. Je veux parler du processus de révision des valeurs locatives des locaux à vocation commerciale ou destinés à l'habitation. Le gouvernement s'est, sur ce dernier point, engagé très officiellement au Sénat le 15 décembre 2012 et un calendrier précis est très clairement annoncé pour les travaux d'évaluation des 45 millions de locaux concernés et pour la mise en application lissée de la réforme.

On sait qu'en France la fiscalité locale repose pour l'essentiel sur les valeurs locatives des patrimoines bâtis au travers des dispositifs de la taxe d'habitation et des impôts fonciers locaux.

La recette générée annuellement par les rentrées fiscales de ces impôts est d'environ : 18 milliards pour la taxe d'habitation, 24 milliards pour les taxes sur le foncier bâti. Soit une recette de 42 milliards d'euros.

Qui paye ces 42 milliards d'impôts ?

On sait que faute de mise à jour sérieuse des valeurs locatives foncières depuis 1970, d'invraisemblables situations d'iniquité se sont créées au fil du temps, ce qui impacte très durement le principe de justice fiscale hérité de la révolution française de 1789.

Les expérimentations conduites en 2010 dans 5 départements français sur les seules valeurs locatives commerciales ont par exemple révélé que les écarts constatés entre valeur locative et valeur réelle actualisée peuvent dans certains cas atteindre des proportions élevées (pouvant atteindre 30 à 40%). La situation d'iniquité fiscale ainsi constatée défie l'entendement !

Le recours à des valeurs locatives révisées et donc remises à jour sur des bases comparatives objectives et transparentes sera dès lors de nature à produire une redistribution fiscale d'ampleur considérable.

Sur la base de la masse fiscale concernée (42 milliards d'euros) et ayant à l'esprit qu'il s'agit bien de procéder à masse globale inchangée, on peut estimer que les flux de variations d'impôts (les augmentations pour les uns s'équilibrant par les diminutions constatées pour les autres) se situeront sans doute à au moins 10% de la masse fiscale. Soit vraisemblablement au moins 4 à 5 milliards d'euros d'impôts locaux qui vont migrer vers d'autres contribuables des mêmes territoires.

On voit bien que cette révision jugée par tous souhaitable mais repoussée mandature après mandature depuis 30 ans aura un impact considérable sur la redistribution fiscale en France.

Il n'est pas faux de dire que le lancement de cette révision, ardemment soutenue par le Sénat, se révèle sans doute l'une des décisions politiques majeures du quinquennat sur le plan fiscal.

 

(1) Il faut rappeler que la Contribution Exceptionnelle de Solidarité prévue à l'article 8 du PLF 2013 n'avait pas vocation à durer plus de 2 ans et ne portait au surplus que sur 210 millions par année pour un nombre très restreint de 1500 contribuables appelés à débourser en moyenne 140 000 € chacun.

(2) On ne peut à ce point sous estimer toutes les dispositions sur la fiscalité du patrimoine et des revenus du PLFR de juillet 2012 et du PLF 2013... La droite a même parlé de matraquage fiscal... C'est dire !

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